C’est l’histoire de Roméo qui aime Juliette qui aime Roméo. Jusque là, tout va bien. Mais on connaît la suite: les Montaigu d’un côté, les Capulet de l’autre, et une haine mordante entre eux. Ce sont presque encore des enfants – la jouvencelle a treize ans – mais leur avenir est embrumé par cette opposition familiale. Dans cette pièce que William Shakespeare écrit en 1597, chacun joue son rôle jusqu’au bout. Les pères, qui maintiennent la ligne du devoir envers les ancêtres, les enfants, qui vivent pour faire passer devant nos yeux le météore d’un amour lumineux, et les personnages de l’ombre, qui poussent l’action, perversement ou pas, vers l’irréparable. Même la mort tient sa partition avec éclat: clore sans appel la découverte extatique et fugace de la passion. Anne Bisang a envie de continuer son exploration du sentiment amoureux. Après le regard aigu de Fassbinder sur la possessivité de Petra von Kant, celui de Shakespeare, quatre siècles plus tôt, sur celle de deux très jeunes gens qui cueillent la merveille et s’éclipsent. «Il y a là un regard non seulement sur l’amour, mais aussi sur la haine. Et puis la question du suicide des jeunes gens. Cette manière de dire un oui absolu à l’autre.»
