Dossier pédagogique - Perdre son sac / nos parents
La fracture sociale / âge conseillé : dès 15 ans / durée : 1h env.
Quoi ?
Dans Perdre son sac, une jeune femme parle. Une femme dans la rue, qui s’adresse aux autres, ceux qui passent. Comme ces personnes que l’on entend crier dans les rues, les « fous », les inadaptés du monde.
Depuis le côté de ceux qui n’ont pas, qui sont muets. De ceux dont on lit la vie dans les journaux, mais que l’on ne connaît pas. Elle dit le besoin d’être ensemble, le besoin d’être entendue, d’être vue, le besoin de ne pas être invisible, le besoin de dire.
Être vue : ce n’est pas pour rien que les gilets jaunes ont un gilet jaune. Ils sont ceux, justement, comme notre « héroïne », que l’on ne voit pas. Dont la vie n’existe pas. Ils sont le côté obscur du monde. Et Perdre son sac peut aussi renvoyer à cette réalité-là. Perdre son sac raconte la blessure, et même la f(r)acture ; sociale, culturelle, économique, de genre, et sexuelle. La fracture entre les « eux » et les « nous ». Tout le monde peut être un « eux » ou un « nous ». Cela raconte la minorité, les minorités. Bizarrement, aussi, dans ce flot de paroles, on peut aussi entendre la difficulté/impossibilité de dire, de se faire entendre/comprendre.
Pourquoi ?
Ce qui intéresse Denis Maillefer, aussi, c’est de faire entendre/sonner la langue, la belle langue française. Une langue qui vient de Racine, qui est aussi passée par Koltès.
Perdre son sac peut d’ailleurs se voir comme un écho féminin, de La nuit juste avant les forêts, de Koltès justement. Un théâtre si physique de paroles, où la parole est physique, justement. Sculptée, travaillée, ininterrompue, comme une rivière tantôt calme tantôt agitée de rapides. Une langue à la fois brute, parfois triviale, et aussi jamais réaliste. Et cette langue raconte aussi cette fracture-là, culturelle. Ceux qui « ont » la langue, et ceux qui ne l’ont pas, ceux qui « ont » la culture et ceux qui ne l’ont pas. Cette langue, comme souvent avec Rambert, est une matière de jeu qui offre des possibles et des territoires concrets et vraiment poétiques pour l’actrice. C’est « écrit pour les acteurs », comme on dit. D’autant plus que Perdre son sac a été écrit pour Lola Giouse, et que cela s’entend. Cette langue donne vraiment l’impression que c’est la sienne.
Comment ça se passe ?
Un théâtre « classique », qui montre une individue s’adressant aux autres, au public. Comme une agora ritualisée, comme un théâtre antique, sensuel et citoyen. Avec un mélange politique/poétique où les idées sont d’abord le résultat d’une histoire unique et intime, celle de cette femme qui n’a pas de nom, anonyme, justement, que l’on entend crier dans la rue mais dont on pourrait ne rien savoir, mais dont on entend ici la blessure, le passé, et le manque infini d’amour, le manque infini de sa grand-mère, son amour originel.
L’actrice sera en vitrine. Elle est laveuse de vitres, et on la découvre derrière une vitre. On ne sait pas si elle est dedans ou dehors, mais elle est séparée de nous. Elle n’est pas dans notre monde, ou l’inverse. Sa parole nous parvient amplifiée, dans tous les sens du terme.
Avec: Lola Giouse
Thématiques: la fracture sociale, culturelle, économique, de genre et sexuelle, les gilets jaunes, la marge, l’autre, le monologue
Activités pédagogiques: préparation dans votre classe à la sortie théâtre (quelques jours avant votre venue ou le soir-même 30 min. avant le début du spectacle), rencontre avec l’équipe artistique et discussion à la suite du spectacle (30 min.)