Matthias Langhoff
En 1941, Matthias voit le jour à Zürich. La famille Langhoff a dû fuir le régime nazi et ne regagnera l’Allemagne qu’en 45. Le patriarche, Wolfgang Langhoff, metteur en scène et ami de Brecht, sera l’un des grands artisans du retour de ce dernier à Berlin en 1947 en l’invitant à monter ses premiers spectacles au Deutsches Theater qu’il dirige.
À 20 ans, Matthias débute une carrière de comédien au Berliner Ensemble. C’est dans cette fabrique de théâtre qu’il rencontre Manfred Karge. Le duo de choc mettra en scène conjointement pendant une vingtaine d’années. Matthias travaille également à la Volksbühne de Berlin avant de migrer en ex-Allemagne de l’Ouest, au Schauspielhaus de Bochum.
Il revient en Suisse pour diriger le Théâtre de Vidy-Lausanne en 1988-1989, après avoir presque dirigé la Comédie de Genève. En 1987, il est en effet pressenti à la tête de l’institution genevoise et écrit le fameux Rapport Langhoff.
Il rentre en Allemagne trois ans après la chute du mur, en 1992 pour co-diriger le Berliner Ensemble avec Fritz Marquardt, Peter Palitzsch, Peter Zadek et son ami Heiner Müller mais l’aventure collective prend rapidement fin. Matthias Langhoff devient conseiller artistique du Théâtre National de Bretagne, à Rennes. Il a obtenu la nationalité française et vit actuellement à Paris.
Comme tous les exilés, il se sent chez lui partout et nulle part. Il est l’incarnation vivante et l’héritier des rebondissements d’un XXe siècle tourmenté, et d’une histoire de l’Europe écartelée entre atomisation et unification.
Son théâtre, à l’image de son histoire, mêle gravité et burlesque, rigueur et démesure. Shakespeare, Heiner Müller et Strinberg l’obsèdent. Son audace dramaturgique, associée à son amour des grands textes, procède par association de matériaux qui viennent percuter les mots. Des inserts d’images, d’archives, de citations, de références musicales, d’éléments scénographiques déplacent le contexte, créant une nouvelle combinatoire qui bouleverse la perception du texte. Marqué par l’influence brechtienne mais contournant le dogmatisme, il met en scène une vision politique de la fable, montre les rouages du spectacle en train de se faire comme un aveu de théâtre, manie la dialectique et boude le pathos. Langhoff considère que «le théâtre est l'art d'organiser le scandale : il doit révéler le scandaleux et l'obscène que le monde s'efforce de cacher » car « si tout allait bien, dit-il, je ne vois pas pourquoi je ferais du théâtre».
Quelques spectacles récents :
- La Mission de Heiner Müller (1989). Pièce écrite, en 1979, à partir d'une nouvelle d'Anna Seghers intitulée La Lumière sur le gibet. Le Mur de Berlin est tombé huit jours avant sa création par Langhoff au Théâtre de la Ville à Paris. La pièce, qui emprunte au rêve l'enchâssement de plusieurs récits, raconte le parcours en Jamaïque de trois hommes chargés par la Convention de mener, en 1794, le soulèvement des esclaves contre les britanniques mais leur projet révolutionnaire se heurte rapidement aux effets de la contre-révolution.
- La Danse de mort d’August Strinberg (1996). Créée à la salle Richelieu de la Comédie-Française avec Gilles Privat, Muriel Mayette, Jean Dautremay, cette pièce cruelle et drôle décrit l'affrontement sans fin d'un couple isolé du reste du monde sur une île de garnison surnommée « le Petit Enfer ».
- Hamlet-cabaret d’après Shakespeare (2008) dont le titre complet est : En manteau rouge, le matin traverse la rosée qui sur son passage paraît du sang. Langhoff désacralise le chef-d’œuvre pour reconstruire une version bâtie sur la mémoire collective fragmentaire qui en reste. Il inscrit sa relecture dans l’univers du music-hall.
Frédérique Loliée
Elle est l’une des actrices-metteuses en scène du collectif issu de la 1ère promotion de l’école du Théâtre National de Bretagne en 1994 qui fonde cette même année le célèbre Théâtre des Lucioles. Sa complicité artistique avec Martial Di Fonzo Bo et les autres membres du collectif a donc plus d’un quart de siècle. Les Lucioles défendent et animent « un espace possible de chantier, ouvert, où l’on peut partir et revenir » afin de « continuer à travailler ensemble, sans créer une compagnie exclusive et fermée, ni une communauté ». Ses membres actifs se relaient à la mise en scène.
Actrice de caractère, elle travaille avec Matthieu Cruciani, Laurent Vacher, Matthias Langhoff, Jean-François Sivadier, Rodrigo Garcia, Pierre Maillet, Marcial Di Fonzo Bo, Élise Vigier et développe une activité régulière en Italie, notamment avec Andrea De Rosa, Valerio Binasco, Jurij Ferrini, Marco Sciaccaluga.
Quelques dates côté mise en scène :
- Dès 2007, elle forme avec Élise Vigier – également membre du Théâtre des Lucioles – un duo pour lequel l’auteure Leslie Kaplan écrit une série de pièces : Toute ma vie j’ai été une femme ; Louise, elle est folle ; Déplace le ciel ; Levers de rideau révolutionnaires ; Mai 68-Le chaos peut être un chantier.
- Entre 2010 et 2012, elle réalise le documentaire Les femmes, la ville, la folie avec Élise Vigier.
- En 2014, toujours en compagnie d’Élise Vigier, elle adapte et met en scène le roman de Leslie Kaplan Mathias et la Révolution.
- En 2016, les deux femmes écrivent et tournent avec la réalisatrice Lucia Sanchez Let’s go, une série web diffusée sur France3 Normandie.
- En 2018, elle adapte et met en scène En attente-Actes profanes d’Antonio Tarantino puis écrit et met en scène avec Élise Vigier, Gaëtan Lévêque et Philippe Hersant un spectacle mêlant cirque opéra et théâtre : Kafka dans les villes.
Martial di Fonzo Bo
Il quitte l’Argentine pour s’installer définitivement à Paris en 1987. Il a alors 21 ans. Formé à l’école du Théâtre National de Bretagne, il y rencontre Claude Régy avec lequel il joue trois pièces. Sa carrière de comédien prolixe l’amènera à jouer sous la direction de nombreux metteurs en scène, dont Philippe Minyana, Luc Bondy, Olivier Py, Rogdrigo Garcia et Raymond Depardon. Son jeu séduit aussi le grand écran. Il tourne avec plusieurs réalisateurs dont Émilie Deleuze, Gilles Bourdos, Claude Mourieras, Siegrid Alnoy, Brigitte Roüan, Maïwen, Olivier Torres. Il reçoit le prix d'interprétation de la critique théâtrale de Barcelone et le Prix de la révélation du Syndicat national de la critique théâtrale en France en 1995 pour son interprétation du méchant Richard III sous la direction de Matthias Langhoff. S’amorce entre les deux hommes une collaboration qui perdure depuis. Quelques années plus tard, il reçoit à nouveau le Prix du meilleur acteur par le Syndicat de la Critique pour sa partition dans Le Couloir, de Frédéric Maragnani et Philippe Minyana. En 2011, il est nommé aux Molières comme meilleur metteur en scène pour La Mère, de Florian Zeller.
L’homme de théâtre est aussi metteur en scène la compagnie des Lucioles qu’il créée en 1994 avec sa promotion du TNB.
En décembre 2014, il est nommé directeur de la Comédie de Caen, succédant alors à Jean Lambert-Wild.
Quelques-unes de ses mises en scène :
- Copi, un portrait (1998). Il collabore avec Pierre Maillet et Elise Vigier pour monter cette pièce, créée en France, elle tournera ensuite en Amérique du Sud.
- L'Excès-l'usine de Leslie Kaplan (2002). Intégrant l'Orchestre national de Bretagne qui interprète une partition de Heiner Goebbels, Surragate Cities, ce spectacle pharaonique intègre une cinquantaine de musiciens, huit acteurs et une soixantaine d'habitantes et habitants de la ville de Rennes.
- La Estupidez (La Connerie) de Rafael Spregelburd (2008). L’auteur argentin s’inspire des Sept Péchés capitaux de Jérôme Bosch pour écrire sept pièces.
- La Terquedad (L’Entêtement) de Rafael Spregelburd (2011). Martial Di Fonzo Bo poursuit son chantier Spregelburd et crée ce nouvel opus de l’heptalogie pour le Festival d’Avignon
William Shakespeare
Sir Will jouit d’une aura telle qu’on lui prête des origines mythiques, voire extra-terrestres. Voici quelques informations à l’usage de celles et ceux qui ne doutent pas de la réalité tangible de son existence. Il y a tout juste 5 ans, se fêtaient les 400 ans de sa disparition. Né dans une fratrie de huit, de parents secrètement catholiques dans un pays réformé, William Shakespeare se marie à 18 ans avec Anne Hathaway, de huit ans son aînée. Ils ont trois enfants dont les jumeaux Judith et Hamnet (à ne pas confondre avec Hamlet). Surnommé « le Barde », il est l’auteur de langue anglaise le plus important du monde, père d’un nombre incalculable de néologismes et d’inventions verbales, au point que « la langue de Shakespeare » suffit à désigner l’anglais.
À croire qu’il n’aime pas les chiffres ronds, son œuvre magistrale se compose de 39 pièces, 154 sonnets ainsi que des poèmes.
Ses pièces sont interprétées par la troupe d’acteurs à laquelle il appartient ; les Lord Chamberlain’s Man. Leur destin bascule lorsque Jacques 1er succède à la Reine Elisabeth en 1603. Il devient mécène de la troupe, rebaptisée les King’s Man. Les acteurs construisent alors leur propre théâtre ; le fameux Globe où plus de six pièces se jouent chaque semaine. Sous protection du Roi, Shakespeare meurt riche et célèbre à 52 ans mais il n’aura pas vu ses pièces officiellement publiées de son vivant. Rois fous et fous royaux, amoureux à mort, ermites philosophes, travestis, reines perverses et ado hallucinés naissent dans son esprit et continuent aujourd’hui à peupler notre imaginaire collectif.
Quelques titres de tragédies, comédies et pièces historiques :
- Les Deux Gentilshommes de Vérone (1589-1593)
- Henri VI (1590-1592)
- Richard III (1591-1593)
- Roméo et Juliette (1594-1596)
- Le Songe d’une nuit d’été (1594-1595)
- Jules César (1599)
- Hamlet (1599-1601)
- Othello ou le Maure de Venise (1602-1604)
- Macbeth (1606)
- Antoine et Cléopâtre (1606-1608)
- La Tempête (1610-1611)
- Henri VIII (1612-1613)