Journal

Comment réconcilier le public avec les salles de classe et les cours d’allemand ?

Regards de la dramaturge

Autour du spectacle "The Game of Nibelungen"

Entre le mime et le théâtre d’objets, The Game of Nibelungen est un spectacle sanglant, décapant, délirant, qui réconcilie le public avec les salles de classe et met un baume réparateur sur le souvenir parfois douloureux des cours d’allemand. Décryptage par Annick Morard de cette création de Laura Gambarini & Manu Moser, à l'affiche du 9 au 17 janvier 2024 à la Comédie de Genève, dans le cadre du Focus S'élancer.

Spontanée, franche et directe, Laura Gambarini est une artiste de rue qui sait accrocher le regard, capter l’attention du public et l’emmener où elle veut, y compris vers des mondes imaginaires et des espaces fantastiques. Pour ce spectacle, sélectionné pour représenter la Suisse à Avignon, Laura Gambarini s’est alliée au metteur en scène Manu Moser, lui-même adepte de l’adaptation d’œuvres classiques pour le théâtre ou la rue. Ensemble, ils transforment un monument de la littérature allemande médiévale en épopée contemporaine, vaillamment défendue par une enseignante survoltée.

Laura Gambarini se souvient :

« En septembre 2020, je n’en peux plus de regarder des séries sur mon canapé. Le COVID ayant annulé/reporté toutes les représentations, je change momentanément de travail pour assurer ma subsistance. Je reprends donc le job d’étudiante qui m’avait permise de financer mes études de lettres et enseigne l’allemand dans un lycée vaudois.

Dans le corpus, se trouve la chanson des Nibelungen, une épopée médiévale, pilier de la littérature germanique et nordique. L’équivalent des légendes arthuriennes pour l’Allemagne. Je me retrousse les manches car l’intrigue est... comment dire...touffue !

Je viens du théâtre de rue, alors évidemment, je m’éclate à gesticuler, mimer, faire du théâtre d’objet avec tous les objets qui m’entourent dans la salle de classe, utiliser de la musique. « The Ring of Fire » de Johnny Cash et « Killing in the name » de Rage Against The Machine accompagnent les chevaliers tuant des dragons. Je ne crois pas que les élèves étaient prêts à ça !

Et là, ça fait tilt ! Mais ne pourrais-je pas proposer cet acte de littérature gesticulé à d’autres lycéens ? Leur montrer les origines et des intrigues dignes du Seigneur des Anneaux ? Et pourquoi se limiter aux ados ?

Au lieu de creuser le Röstigraben, j’ai envie de construire des ponts par dessus les frontières qu’il y a dans nos têtes. Un peu d’audace, warum nicht ! »


Annick Morard
Responsable des publications de la Comédie de Genève